Parlez-vous flipper ?

Traduisez : «Quand ta bille part en avion, faut bourrer ou sortir une fourchette.» … Impossible ?

Comme toute discipline, le flipper a son jargon. Première étape de l’intégration dans la (petite) communauté des flippophiles : la maîtrise de son langage technique. Primo, ça vous évitera de passer pour le clampin lambda qui touche l’engin une fois l’an ; et secundo, l’apprentissage de ce lexique peut vous ouvrir les portes vers des gestes auxquels vous n’auriez autrement pas pensé. Revue non exhaustive.

1. Domestiquer la bête

Fronton : panneau vertical fixé à l’arrière de la machine qui sert d’abord à attirer le chaland. Rendant le nom du jeu visible de loin, il affiche également les scores, et indique pendant la partie les combinaisons à effectuer pour gagner un maximum de points. À surveiller d’un œil.

Plateau : c’est là que ça se passe ! Pour les flippophiles, c’est un espace d’expression libre ; pour les novices, un terrain semé d’embûches. Surface plane décorée en accord avec le thème du jeu, son inclinaison varie entre 3 et 6 degrés.

Bille « Powerball » en céramique sur un flipper Twilight Zone

Bille : ne surtout pas l’appeler balle, ou boule, ça fait joueur du dimanche, ou de pétanque (au choix). Les billes standard sont en acier au chrome. Elles mesurent entre 1 et 1,16 pouce de diamètre (soit 26,9 mm) pour un poids de 80 grammes. Le mythique flipper Twilight Zone est l’un des rares à utiliser une bille en céramique.

Lance-billes : sans lui, pas de partie. Peut être manuel ou automatique.

Flips ou flippers ? C’est l’éternelle querelle, LE flou sémantique qui entoure la dénomination du mécanisme actionné par le jouer pour renvoyer la bille. Selon Le Petit Robert, il convient d’employer le terme flipper, dans le respect de la tradition anglo-saxonne (qui utilise l’appellation pinball pour désigner le jeu dans son ensemble, et ne connaît par conséquent pas le même débat). Les flippophiles francophones admettent cependant l’usage du terme flip pour marquer une distinction avec le reste de la machine. L’Académie Française préfère quant à elle les termes «raquette» ou «batteur», mais celle-ci joue au «billard électrique»… Choisissez votre camp. Quelle que soit leur appellation, ces pièces peuvent être de gauche comme de droite, défectueuses quand elles ne sont pas faiblardes, fabriquées en plastique moulé ou vissé, et sont entourées d’un bracelet en caoutchouc pour plus de rebond. À vous d’en faire bon usage.

Ball lost : nom par défaut du trou, situé en bas du plateau, dans lequel finissent les billes un jour ou l’autre.

Babasse : (régionalisme) n.f. synonyme de flipper dans le Rhône-Alpes.

2. Identifier les pièges…

Tilt : au flipper, quand «ça fait tilt», c’est que vous venez d’avoir une mauvaise idée. En général, celle de taper ou de secouer la machine. Le tilt fait son apparition en 1935 sur les flippers du fabricant Williams, afin de sanctionner les joueurs qui soulèvent la table pour empêcher leur bille de tomber (en anglais, «to tilt» signifie «incliner»). Lors d’un tilt, tous les éléments du plateau deviennent inopérants, dont les flips qui cessent de répondre. Le gel dure jusqu’à ce que la ou les billes en jeu tombent dans le ball lost, après quoi la partie peut reprendre. Pour calmer les teigneux, il existe aussi le slam tilt : un capteur placé sur la porte du monnayeur, qui réagit en fonction d’un choc important (coup de genou par exemple) en faisant perdre au joueur l’ensemble de ses billes et crédits.

Avion : action d’une bille partant du haut du plateau avec une trajectoire quasi verticale et s’échappant vers la sortie centrale sans que le joueur n’ait pu la toucher. Très frustrant pour qui ne maîtrise pas la technique de la fourchette, et cause fréquente du syndrome de la vitre étoilée.

Garages : couloirs latéraux menant directement une bille vers le ball lost.

Coulante : action d’une bille s’échappant à faible vitesse par l’un des garages, après avoir touché les plots d’entrée de ces couloirs.

Gabriellette : (péjoratif) perte simultanée des billes au cours d’un multibille. Jette soit l’hilarité, soit la consternation parmi les spectateurs.

Syndrome de la vitre étoilée : Certains flippers sont connus pour la facilité déconcertante de perte de bille (c’est le cas du Dr. Dude de Bally, célèbre pour ses avions en raison de l’espacement entre flippers qui est de deux fois le diamètre de la bille). Par frustration, certains joueurs donnent un violent coup sur la vitre pouvant la briser sans la disloquer. Les fissures dans le plexiglas sont poétiquement assimilées à des étoiles. Après, «ça fait tilt».

3. … et apprendre à les déjouer !

Fourchette : manipulation très rapide des deux flips (quasi-concommitante mais en fait légèrement décalée) permettant à un joueur de sauver une bille filant vers la sortie centrale. Manière sûre de reconnaître un joueur de haut niveau, tant la bille paraît normalement perdue. Sur les machines où les flips sont trop écartés, les fourchettes sont quasiment impossibles.

Amorti : simple pression sur le bouton commandant la levée d’un des deux flippers du bas, dans le but de stopper une balle arrivant lentement par le couloir situé sur le même côté que le flipper actionné, afin qu’elle reste immobile dans le creux et de donner au joueur suffisamment de temps pour viser un endroit particulier du plateau et relancer cette balle. Une variante de cet amorti dit classique, l’amorti-stop, consiste à commander le flipper à l’approche d’une balle arrivant par le centre et assez vite, de manière à ce que la force générée par cette action vers le haut compense exactement la force vers le bas de la balle, la stoppant net sur le bout du flipper.

Bourrer : faire bouger le flipper en le tapant à droite, à gauche ou au milieu. Si l’on y met assez de tact pour ne pas déclencher un tilt, cette action permet de dévier légèrement la trajectoire d’une bille (pour la sauver, par exemple).

Claquer : gagner une ou plusieurs parties gratuites. Le jeu émet alors un « CLACK » relativement fort à chaque crédit gagné.

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